Attention, cet article contient des spoilers sur : Edge of Tomorrow.
Quatre mois sans chronique, et un nouvel article qui parle d’une œuvre cinématographique, voilà que vous, lecteurs, commencez à vous poser des questions sur le bon devenir du site. Aucune inquiétude, si la durée entre les publications s’est largement espacée depuis quelque temps, et cela perdurera quelques mois de plus vu les différents projets personnels qui m’accaparent à peu près tout mon temps libre, le site va encore continuer son bonhomme de chemin. J’ai même quelques surprises dans la besace… Fin de la parenthèse, ce qui nous intéresse aujourd’hui prend la forme d’un film. Edge of Tomorrow, pour être plus précis.
Ce texte n’a pas pour vocation d’être une critique, loin de là, mais l’idée est plutôt de faire le parallèle avec le jeu vidéo, et plus particulièrement le speedrun. La particularité de cette production réside dans le fait d’accorder la résurrection infinie au personnage principal, jusqu’à ce qu’il atteigne son but, c’est-à-dire la victoire sur de belliqueux aliens particulièrement bien armés, et nombreux. Un film de guerre donc, avec son héros, avantagé, qui respawn sans arrêt au début du premier jour de son court entrainement, veille de l’attaque des côtes normandes tenues par les extra-terrestres. Et chaque fois, il meurt au combat. Une balle mal placée, une explosion, un tir allié, n’importe quoi de létal et imprévisible. Et chaque fois, il réapparait le jour précédent, se faisant à nouveau la main avec son équipement, puis cherchant encore et toujours une faille dans la bataille qui fait rage le lendemain. Edge of Tomorrow semble tirer sa substance du principe même du jeu vidéo, avec Tom Cruise en guise de joueur, évoluant au cœur d’un débarquement militaire représentant le seul et unique niveau. La journée d’entrainement fait office d’apprentissage du joueur, devenant ainsi plus vif, plus fin observateur de son environnement, lui permettant alors de progresser plus loin dans un game design prévu d’avance, répété à l’identique à chaque itération, à chaque vie du personnage principal. Les habitudes se forment et l’aisance du joueur s’accentue au fil des essais.
J’ai tout d’abord pensé à Rayman Origins quand j’ai regardé Edge of Tomorrow. Les phases de poursuite du coffre à pattes, par exemple, offrent un bon parallèle que l’on pourrait analyser. En effet, ces quelques niveaux demandent un certain sens du rythme, vu l’intensité du scrolling, ainsi qu’une connaissance quasi religieuse du level design et du gameplay. Sauter à tel moment, esquiver un rocher, mettre plus de force dans l’un des bonds pour atteindre une corniche branlante, autant de réflexes qui s’apprennent à la sueur du front, et suite aux nombreuses tentatives nécessaires à rattraper ce sacré coffre à pattes. Du par cœur qui peut sembler lourdingue, dit comme cela, mais récompensé par une forte dose d’adrénaline, accompagné du sentiment d’avoir fait un parcours impeccable. Le parallèle avec Edge of Tomorrow, où le personnage principal teste lui aussi toutes les possibilités pour accomplir un run parfait et rapide de son « niveau », m’a littéralement sauté aux yeux lorsqu’il décide d’abandonner sa compagne pour tenter, seul, sans gène ni obligation de protection ou d’attente inutile, de remplir son objectif. On ne va pas se le cacher, combien d’ami(e)s avons-nous délaissé afin de nous focaliser sur ce satané coffre qui trace à toute vitesse, dans un enchainement complexe d’obstacles qui nous absorbe complètement ? Et bien, Tom Cruise, c’est pareil. Il abandonne celle qu’il essaie de protéger, jour après jour, pour se concentrer sur son expérience, son vécu et son par cœur du parcours.
Plus qu’une vision générale du jeu vidéo, Edge of Tomorrow apparait surtout comme une adaptation cinématographique du concept du speedrun, ou en d’autres termes, la façon la plus rapide, efficace et sure de terminer un jeu. Faire un pas à gauche à 7 minutes et 32 secondes pour éviter une mine, se baisser 26 secondes plus tard pour esquiver un débris d’explosion, puis tirer une grenade et mettre hors de combat quatre ennemis qui allaient brusquement surgir. Bienvenue dans le monde de la perfection du speedrun, concept que réemploie allégrement le film pour emmener son héros à survivre à la bataille où fourmillent de multiples mais toujours identiques dangers. Une progression par la tentative et l’échec, aboutissant à l’optimisation la plus réfléchie de la manière de terminer un niveau. Tom Cruise fait son speedrun, observant à chaque tour, à chaque vie dépensée, une meilleure façon de se faufiler entre les balles et les vigoureux aliens, et poussant à chaque fois un peu plus loin l’échéance de sa propre mort. Avant de recommencer, inlassablement.
2 réponses à “Edge of Tomorrow, analogie du speedrun”
Subtile analyse, très pertinente, j’ai eu un peu la même sensation lorsque j’ai vu le film (que j’ai beaucoup apprécié). Faudrait d’ailleurs que je me trouve le manga, certainement plus riche que le film!
C’est vrai qu’Edge of Tomorrow est tiré d’un manga (All You Need Is Kill) ! La parution française est toute récente d’ailleurs.
Tu nous en diras des nouvelles 🙂